Lausanne
Jean-Pierre Randin, un médecin de cœur pour les urgences

En cas d’urgence sanitaire, composez le 144. Un geste simple,
rapide et au suivi immédiat. Au centre et à l’origine d’un
dispositif professionnel performant le docteur Jean-Pierre
Randin. Jeune praticien à l’époque, il part d’un fait divers
dramatique pour développer l’excellence en matière d’urgence
médicale. La création de la Fondation 144 aura lieu en 1993 et
la centrale CASU de Lausanne reçoit sa certification IAS en
2010.
« Le 144 a sauvé la vie à mon frère », Jean-Pierre Randin
Sur une terrasse de la place Centrale à Lausanne, un lieu que le
docteur connait bien à quelques pas de son bureau et des livres
de la librairie Payot, il nous parle de cet engagement qui ne
l’a pas quitté depuis qu’il assiste, alors jeune médecin, à un
fait divers à l’issue fatale. Les années ont passé, la centrale
144 existe et hasard du calendrier, son frère sera sauvé grâce à
l’intervention rapide et la qualité des services du SMUR.
Difficile d’aborder cet épisode de vie sans une grande émotion.
« Je me suis engagé à fond pour que notre ville et notre canton
bénéficient d’un service d’urgence santé performant. Un parcours
long et difficile. Il fallait convaincre et bousculer les
habitudes et les acquis de certains praticiens réfractaires à
une centralisation des appels, à la professionnalisation des
intervenants et surtout à l’utilisation d’une technologie de
pointe moderne et efficace et une perte de certaines
prérogatives.
A l’époque il n’existait que la Centrale des médecins à la route
d’Oron avec un médecin de garde et un infirmier et ces gens se
débrouillaient comme ils pouvaient face à l’urgence des cas et à
leurs moyens d’intervention limités. « Il faut que ça bouge! ».
Une phrase qui sera entendue par d’autres collègues dont le Dr
Olivier Moeschler, médecin anesthésiste et fondateur du SMUR
lausannois, trop tôt disparu, René Bezençon, ancien chef du
groupe sanitaire, ou encore Yvette Barbier, spécialiste en
médecine interne. «Le concept n’était pas acquis d’avance il
fallait aussi convaincre les instances politiques de réunir sous
un même toit tous les intervenants. Sur cette base, les
réticences sont tombées et le raisonnement s’est étendu de
Lausanne vers le Canton.
Le Service mobile d’urgence et de réanimation (SMUR) a suivi. Il
a fêté son 20ème anniversaire. Le fil conducteur « toujours en
dialogue » fait sa force. Des ambulanciers anciennement
policiers, devenus professionnels sous l’impulsion du Dr Randin,
en contact direct avec la centrale offrent un service modulable
et la régulation de l’urgence. « Il fallait développer tous les
maillons de la chaîne ». Et si c’était à refaire ? «
Aujourd’hui, entre 3 à 9 minutes dès l’appel au 144 nous sommes
sur place avec un dispositif qui permet une intervention
médicale immédiate. Cela me conforte dans l’idée que le combat
en valait la peine ».
Et comme Jean-Pierre Randin est un médecin qui ne lâche jamais.
Il crée le Détachement- poste-médical-avancé (DPMA) composé de
médecins, ambulanciers, ières, infirmiers, ières, et de
secouristes-samaritains: 80 personnes volontaires mobilisables
en tous temps, qui travaillent bénévolement dans certaines
occasions (par exemple lors des 20 kms de Lausanne). Le groupe
dispose d'un véhicule de commandement avec tout le dispositif de
la centrale 144 en appui. «Je suis très fier et très touché par
ce monde de l’urgence au sein duquel les gens sont solidaires et
ne comptent pas le sens du sacrifice ». Le Dr. Jean-Pierre
Randin est un homme de combat à la sensibilité à fleur de peau.
Un médecin de cœur dont l’urgence d’un système santé à
moderniser lui a valu des succès mais aussi des déceptions. Le
sport, petite reine ou course à pied, lui permet d’évacuer le
trop plein et de promouvoir cette façon de lutter contre la
sédentarisation, la malbouffe et le danger de surmenage.
Petite biographie. Le Dr Jean-Pierre Randin, spécialiste
FMH en médecine interne et endocrinologie-diabétologie, ouvre
son cabinet à Lausanne en 1988. Il devient aussi médecin-conseil
de la Ville de Lausanne, fonction qu’il assume avec joie et dans
un esprit de partage et de liberté. La nuit de Noël 1989 et le
décès d’un patient d’un arrêt cardiaque, faute de soins
appropriés suffisamment rapides le conduira à mener une
incroyable croisade auprès des politiques, ambulanciers et
médecins. De cette fructueuse collaboration naît le 144, le SMUR,
la coopération avec les pompiers et la professionnalisation du
métier d’ambulancier. Le Détachement post-médical avancé (DPMA)
est la seule équipe de ce genre en Suisse Romande. Il passe son
enfance à Orbe dans une famille modeste de quatre enfants. Il
transmet des valeurs morales à ses trois enfants et rend hommage
à sa femme qui l’a toujours épaulé et suivi dans ses démarches. |
Dany Schaer
Paru dans le Journal Clin d’œil, septembre 2013
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