Combremont-le-Grand
Les chevaux osent vieillir au ranch du saule

Caly, 20 ans |

Agnès Meige |
Une fin de vie heureuse sous bonne surveillance au cœur de la
campagne vaudoise – c’est pour cela que se bat la fondatrice de
l’EMS pour chevaux « Le ranch du saule ». Agnès Meige, Deborah
et Martial Estoppey ouvrent la porte du home où les seniors se
la coulent douce.
« Les heures de notre vie passées à cheval ne sont jamais du
temps perdu » Winston Churchill
Lorsque le cheval prend de l’âge, qu’il devient un peu sourd,
pas très solide sur ses pattes, que l’entrée de son box devient
floue et qu’il ne peut plus servir l’homme, la question se pose
alors pour son propriétaire. Puis-je rester fidèle à mon
compagnon ou dois-je m’en séparer pour le remplacer par un autre
animal plus jeune ?
Décemment, acquérir un remplaçant ne peut signifier l’arrêt de
mort de Kepi, Sofia ou Basilic. «Le ranch du saule» accueille
sur ses terres des jeunes retraités mais aussi des meurtris,
fatigués d’avoir tant donné. Agnès Meige s’arrête près de Caly,
une irlandaise de 20 ans qui doucement pose la tête sur son
épaule: «Parfois la séparation n’est pas due à l’âge mais aux
circonstances qui ne permettent plus au propriétaire de garder
son cheval ». Flasch avance d’un pas prudent, elle ne voit plus
très bien, à 31 ans elle est la doyenne du troupeau et bénéficie
de tous les égards. «Si on veut offrir aux vieux chevaux une
retraite paisible il faut qu’ils vivent libres sans contrainte
et en groupe. Ainsi ils ne s’ennuient pas et s’assemblent selon
les affinités. Une hiérarchie s’établit entre eux et de temps en
temps il y a une petite chicane puis tout rentre rapidement dans
l’ordre. De nombreux propriétaires nous contactent et sont prêts
à débourser un prix de pension pour le bien-être de leur animal.
Mais il faut créer des lieux d’accueil».
L’exploitation agricole, entièrement bio, a été aménagée en EMS
pour chevaux en 2007. Les animaux bénéficient d’un vaste domaine
de huit hectares répartis entre la partie haute et celle en
contre bas. Les repas sont pris en commun dans ce qui autrefois
était la halle de stabulation libre pour les vaches. Transformé
depuis peu, le bâtiment est lumineux, vaste et sent bon la
paille fraîche. Chacun trouve aisément sa place et les belles
touffes de foin déposées dans les mangeoires. On se bouscule
même pour arriver le premier et tant pis pour les retardataires.
Sous la bienveillante attention d’un trio motivé et d’une
atmosphère sereine, les chevaux bénéficient d’une fin de vie
digne et heureuse. «Les voir courir, s’ébattre sans mord, sans
fers ni selle, est un réel bonheur. C’est le paradis pour eux !
s’exclame Deborah Estoppey. Cavalière émérite, la jeune femme ne
peut imaginer vivre sans chevaux. Elle partage son temps entre
ses études, l’entretien de Muscade qu’elle monte tous les jours,
et la vie du home. Un compromis qui l’enchante. Plus tard, mes
études terminées, j’aimerais développer la thérapie avec les
chevaux ». Ciboulette ne perd pas un mot de la discussion,
curieuse elle approche de l’appareil de photo…elle sait qu’elle
est la plus belle.
Martial Estoppey, gérant de la boucherie de Thierrens, s’occupe
de la logistique du domaine. Importateur d’aliments pour chevaux
il préconise aussi les céréales pour ses vieux amis. « Le ranch
du Saule » est un havre de paix pour les animaux et les quatre
chiens du domaine, Patch, Chipie, Lilou et Doudoune, ne vont pas
contredire le maître.
Flasch nous regarde partir avec sa tête grisonnante légèrement
penchée. La vieille dame de 31 ans sait encore ce qu’elle veut,
rester là où elle se sent bien et vieillir en paix à l’ombre du
saule.
Dany Schaer
EMS « Le ranch du saule »,
Agnès Meige 079 796 77 00 ou Martial Estoppey, Aliment Lambey,
079 798 87 62
Paru dans l’Echo du Gros-de-Vaud, février 2011
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