Sottens
Doriana Tornese : l’art pour vivre
Pétrir la terre, travailler les formes, lisser le bronze, c’est
le début d’un long voyage pour Doriana Tornese. L’artiste
découvre l’art thérapie pour vaincre la maladie. Une exposition
témoigne du bonheur retrouvé.

« J’aime le contact avec la matière et la recherche de la beauté
»
La jeune femme est resplendissante. Elle nous accueille dans la
petite salle de l’Auberge de Sottens. Un espace culturel où sont
disposées ses sculptures et ses peintures. Au centre de ses
œuvres, Doriana Tornese est à l’aise. Elle parle de cette
histoire d’amour avec la vie. Si aujourd’hui tout l’étonne plus
rien ne l’effraie depuis qu’elle a vaincu son cancer du sein. «
Créer est le meilleur moyen de me protéger ».
Arrivée en Suisse du sud de l’Italie à l’âge de deux ans,
Doriana suit sa scolarité obligatoire, passe son bac en lettres
et après quelques mois d’université déclare forfait : «ce
n’était pas ma voie. Je me suis tournée vers un apprentissage de
sertisseuse en bijouterie et horlogerie dans la manufacture de
Patek Philippe à Genève». Souhaitant développer sa créativité
elle s’inscrit au GIA à Santa Monica en Californie où elle
obtient son diplôme de dessins en bijoux en 1988. Elle ouvre son
propre atelier de sertissage dès son retour à Lausanne dans
lequel elle exerce son métier pendant plus de 20 ans. Elle donne
des cours de dessins de bijoux à des élèves venus du monde
entier.
En août 2004, le cauchemar, le diagnostic tombe comme un
couperet : cancer du sein. « Pendant une année j’ai couru les
médecins et les hôpitaux. Les chimiothérapies et les séances de
radiothérapie s’enchaînent. Je savais que je pouvais vaincre ce
crabe mais il me fallait trouver une activité qui soigne le cœur
et l’âme. J’avais un fils de quatorze ans à l’époque et il était
hors de question de me laisser partir».
Pendant le traitement, Doriana décide de se tourner vers l’art.
Elle dessine, peint, suit des cours. Et petit à petit l’espoir,
la certitude que rien n’est jamais perdu. « J’ai compris qu’il
fallait bousculer les choses pour pouvoir renaître. Quand on est
dans la souffrance, la créativité est comme une épaule sur
laquelle on pose la joue le temps de souffler un peu ».
Ce moral d’acier elle le doit à la terre qu’elle pétrit usant de
son talent à travailler les formes. Ses sculptures coquines se
moquent du qu’en-dira-t-on, elles sont là, posées jupes en l’air
ou en jarretière dans leur cadre bien ajusté. De la couleur, du
relief, l’artiste met en scène ses œuvres dans la fraîcheur d’un
matin d’automne. Amusée, Doriana sourit parce que la vie est
belle. Elle pose sur ses compagnes immobiles un regard
malicieux, rempli de tendresse. C’est un regard de femme qui
trouve son inspiration dans son jardin secret.
Dany Schaer
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