Littérature
Jacques Chessex, livre posthume

L’écrivain de Ropraz signe avec « Hosanna » son roman le plus
interrogateur.
Une fin de journée aux couleurs sombres. La porte du petit
cimetière de Ropraz grince. Un vent doux chasse quelques
feuilles, l’une reste posée délicatement sur la terre nue de la
tombe. Quelques petits cailloux blancs disposés en cœur sous la
croix de bois témoignent sans doute d’une pensée amoureuse.
Hosanna un dernier souffle de poésie.
Dès les premières pages, l’écrivain sait que la mort rôde. Il
prend le parti d’en parler sans illusion en compagnie du «
Visage » une plaie dans l’ombre de la mémoire, une halte dans
l’absolu bleu. «… Et qu’est-ce que je veux ? D’abord,
différer le moment de ma mort par l’exercice léger, aéré,
presque heureux, d’un temps toujours élastique. N’encombrer ce
temps d’aucune histoire qui le gâterait. Cependant, malgré ma
paresse à détruire son harmonie, même sombre, ou mélancolique,
au moins que le récit que je me ferai, l’histoire que je
m’inventerai, les scènes que je m’autoriserai à vivre et à
raconter, aillent à leur heure dans ce temps parce qu’ils y
étaient souhaités comme des surprises. Des distractions qui me
ressemblent parce qu’autant d’avant-goûts de ma propre mort. »
C’est un livre dense dans un style teinté d’une émotion où règne
l’odeur de Blandine dévêtue, une odeur de miel au cœur de la
forêt. « On n’entendait plus la rivière. Rien que les
oiseaux, et maintenant ils se taisaient, j’avais la respiration
de Blandine qui me comble toujours de regret et de joie.
Pourquoi de regret ? Parce que je suis vieux. Et que je mourrai
avant elle. Pourquoi de joie ? Parce que je suis vieux. Et que
je mourrai avant elle… ».
Le temps passe mais Hosanna de Jacques Chessex dit qu’il avait
assez de désir de Dieu pour espérer, symétriquement, qu’Il
s’intéressât à lui.
Hosanna de Jacques Chessex, aux Editions Bernard Grasset, avril
2013, 119 p.
Dany Schaer
Paru en juin 2013
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