Broc
Bernard Raboud, le monde des plantes est à lui
La droguerie de Broc est le genre d’endroit où l’on se sent
bien. Elle nous rappelle l’enfance, ses potions et sirops à la
saveur douce et aromatisée. Bernard Raboud partage son temps
entre ses recherches santé naturelle, sa collection de livres,
la Confrérie du Gruyère et la musique. Un homme passionné, sans
cesse à la découverte de la nature et du monde qui nous entoure.
Le droguiste brocois accueille ses clients, ses patients
serions-nous tentés de dire, depuis 40 ans avec cette incroyable
volonté de soulager les maux qui s’accrochent au corps et à
l’âme. Sa réputation, il la doit à l’ensemble de ses recherches.
Un précurseur dans les années 70. Le bouche à oreille a fait le
reste. Aujourd’hui, ses conseils et produits naturels sont
connus bien au-delà de nos frontières. Il est vrai que les gens
attachent plus d’importance à ce qu’ils avalent et ce qu’ils
appliquent sur leur corps qu’autrefois.
Bernard Raboud est marié, père de deux enfants et un grand-papa
comblé. Après les classes obligatoires, il a suivi quatre ans
d’apprentissage de droguiste puis une année d’Ecole Suisse de
droguerie et trois ans de stage pour obtenir la maîtrise
fédérale. L’homéopathie, l’aromathérapie, la phytothérapie,
l’intéresse et il ajoute un stage supplémentaire à sa formation.
Il se spécialise enfin en Gemmothérapie. Mais de quoi s’agit-il
? «C’est une thérapie qui utilise les bourgeons et les jeunes
pousses d’arbres et d’arbustes préparés à l’état frais, par
macération, pour obtenir le macérat glycériné. Les tissus
embryonnaires végétaux renferment toute la puissance de la
future plante. Ils renferment des hormones de croissance, des
vitamines, des oligo-éléments, des minéraux et surtout de la
sève apportée par l’arbre », nous explique le spécialiste.
Et que fait le droguiste lorsqu’il quitte ses petites fioles ?
Syndic de son village de 1991 à 2001, il s’investit notamment
pour un projet important. Eradiquer le fléau des moustiques du
lac de Gruyère. Et lorsque le temps le lui permet il s’adonne à
la lecture. Bibliophile passionné, il possède plus de vingt
mille livres dont une remarquable collection d’ouvrages de
Jacques Chessex, Charles-Albert Cingria, Jean Cocteau, Gustave
Roud et Paul Morand.
Et quel lien avec la Confrérie du Gruyère ? Une histoire de
famille, d’amitié et de respect pour un produit noble. Bernard
Raboud se dit attaché aux valeurs de notre pays : « La Confrérie
du Gruyère représente une valeur, le maintien des coutumes et
des traditions. Lors des cérémonies, j’aime tout
particulièrement la présentation des objets que l’on utilise
pour la confection du fromage. Ils ont une histoire, un passé et
c’est à nous qu’il incombe de leur préserver un avenir. C’est
aussi une manière de cultiver l’amitié ». Ce que ne dit pas
Bernard Raboud c’est le rôle important qu’il occupe lors des
repas servis à l’occasion des Chapitres. Cérémonie qui réuni
toute la tradition de la Confrérie. Il est coutume pour le
chantre de présenter les mets selon une prose toute personnelle.
Les textes restent secrets jusqu’à l’heure où l’on se met à
table.
« Il vous est certainement arrivé de croiser, dans les rues de
nos villes et villages, d’étranges cortèges que l’on pourrait
croire sortis d’un film médiéval. Ces cortèges, hauts en
couleurs, ce sont des confréries qui les forment. Elles
symbolisent la convivialité et la joie de vivre dans la société
souvent stressée ou renfrognée qui est la nôtre. Elles sont, en
quelques sortes, les « liants » de notre temps, car ce qui unit
les hommes, n’est ce pas avant tout leurs racines ?
La plupart des confréries sont gastronomiques, ce qui signifie
qu’elles remettent à l’honneur certaines coutumes ou traditions
culinaires locales ou régionales souvent oubliées, toujours
agréables à découvrir. Le plus souvent une nouvelle confrérie
est engendrée par l’amitié. Il suffit de quelques amis qui se
regroupent pour remettre au jour une tradition oubliée. Ces
personnes adopteront ensuite un costume et une médaille
personnalisée, le plus souvent égayés aux couleurs de leur cité.
A vrai dire, les confréries freinent la perte de mémoire, elles
sont le témoin vivace d’une tranche de notre histoire».
L’officine est dans la pénombre, il est bientôt l’heure de
fermer. Nous apprenons sur le pas de porte que Bernard Raboud
est aussi musicien, il joue de l’accordéon. Un instrument qui
lui va bien. Derrière les collines les notes s’envolent vers le
château de Gruyère et les prairies verdoyantes. Le chercheur
rêve-t-il d’un équilibre écologique préservant ses petites
plantes ? La forêt gronde parfois, les bourgeons font figure de
naufragés et c’est bien pour ça que le droguiste croise la
modernité avec prudence et sagesse.
Dany Schaer
Paru dans la plaquette de la Confrérie du Gruyère 2010
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