Carrouge
La croissance vaudoise : chance ou danger ?
La croissance fait débat dans toute la presse romande. Samedi
21 mai l’UDC Vaud organisait un séminaire sur la question.
Jean-Claude Mermoud, conseiller d’Etat, chef de l’Economie, et
Pierre-Alain Rumley, professeur à l’Université de Neuchâtel et
président d’Equiterre ont présenté les perspectives, les enjeux,
les défis et les choix de société auxquels nous sommes tous
confrontés.
"Le développement (…) conduit l’humanité vers de probables
catastrophes en chaînes" Edgar Morin.
Une réflexion qui interpelle le professeur Rumley. « Pourquoi ne
pas sortir de la «pensée unique» relative à la croissance et
adopter une attitude d’ « a-croissance » soit une décroissance
partielle, et renoncer à certains projets. Continuer à produire
mais en utilisant moins de ressources. Diminuer l’intensité de
l’utilisation. Il faut y réfléchir même si le mot décroissance
est mal vécu et la marche de manœuvre relativement faible.
Eviter la fuite en avant par exemple en matière de mobilité.
Rompre le cercle infernal plus on ajoute plus la demande est
forte. Nous pouvons réexaminer les plans d’aménagement, la
politique foncière et renforcer la politique du logement. On
peut maîtriser le type de construction que l’on veut – moins de
centres commerciaux et prendre des mesures dans les plans de
construction ». En matière de logement Pierre-Alain Rumley
privilégie les coopératives. Même si le processus de
métropolisation et la forte croissance attendue avec les
conséquences en matière de trafic et d’urbanisation semblent
catastrophiques des pistes peuvent encore être explorées. Edgar
Morin soulève peut-être la vraie question : «Peut-on avoir une
croissance illimitée dans un monde limité ? ».
Pour comprendre ce formidable développement économique il faut
se rappeler que la fin de l’Arrêté Bonny a produit un effet
d’aubaine avec accélération des investissements étrangers.
Jean-Claude Mermoud voit dans cette croissance trois facteurs
principaux : « la mondialisation, la sécurité et la stabilité
notamment dans le monde du travail, ainsi que la capacité
d’innovation de notre canton. Si la croissance économique est
réjouissante elle a ses effets pervers dont nous devons nous
inquiéter. Les effets connexes doivent être traités pour
eux-mêmes, sans stigmatiser sur la promotion économique. Un plus
fort ciblage des secteurs et types d’activités recherchées, une
différenciation des avantages selon la région d’implantation
avec révision des critères d’octroi d’avantages fiscaux
(exonérations) et le renforcement des outils de promotion
économique endogène sont des points à définir. Le soutien aux
entreprises vaudoises est la pierre angulaire de la promotion
économique. En 2010, l’effort financier a été 2 fois supérieur
pour la promotion endogène CHF 5,7 millions que pour la
promotion exogène CHF 2,6 millions. Si on ne peut pas interdire
à une entreprise étrangère de s’installer chez nous, les
conditions cadres peuvent changer et l’effet « copie » diminuer
».
Le rééquilibrage territorial met tout le monde d’accord. L’Arc
lémanique aura bientôt atteint ses limites alors que les régions
Yverdon, Broye, Chablais, Jura attendent la croissance. Les
outils de suivi et d’évaluation de l’évolution du tissu
économique vaudois, de l’économie des régions et des politiques
sectorielles répondent aux divers enjeux thématiques. La
disponibilité d’une offre de terrains et de locaux adaptée en
fonction des besoins du secteur et du type d’activités des
entreprises doit être coordonnée avec la politique du logement.
Le défi du logement ? L’attractivité due à la santé
économique du canton associée à la libre circulation avec
l’Union européenne est bien réelle. Et si la croissance
démographique peut être un facteur positif elle a aussi ses
effets pervers collatéraux d’où la nécessité d’accompagner le
phénomène du logement. La nouvelle planification territoriale
prévoit d’accueillir de nouveaux habitants de manière
harmonieuse et éviter l’étalement urbain. La politique
incitative de l’Etat de Vaud est un soutien aux communes pour
faciliter l’achat de terrains. Favoriser les logements d’utilité
publique en favorisant l’utilisation du sol plus élevé et
soutien accru aux projets des coopératives d’habitations
notamment dans les régions bien desservies en transports
publics.
Force est de constater que « le gâteau grandit plus vite que les
convives assis autour d’une table pour le manger ». Les
nombreuses questions posées démontrent clairement une volonté de
faire mieux avec les outils que nous avons à disposition.
Jean-Claude Mermoud ne va pas mettre la ville à la campagne mais
bien tenter de maintenir une qualité de vie et des emplois pour
l’avenir des jeunes. Pierre-Alain Rumley observe cette Suisse
totalement au milieu de ces contradictions. Entre la politique
de croissance du Conseil fédéral, la volonté de maîtriser
l’urbanisation, la stratégie de développement durable et la
politique climatique.
Dany Schaer
Paru dans le Journal de Moudon, mai 2011
Quatre questions à Jean-Claude Mermoud, candidat au Conseil
des Etats
Une de vos phrases a marqué les esprits : « je ne veux plus
voir de villa sur une parcelle de 1000m2 pour une famille de 4
personnes. Provocation ou réelle conviction ?
On ne peut plus se permettre de consommer du sol à la légère.
Une parcelle de 600m2 est largement suffisante pour une villa. Le
droit d’emption des terrains constructibles concerne les endroits
pourvus d’un bon réseau de transports publics et d’une forte densité
de population.
Dans cette modernité on a le sentiment que les politiciens se
travestissent. Une conseillère fédérale de gauche propose des
mesures de droite pour régler les questions d’asile, un conseiller
d’Etat de droite rejoint les propositions de la gauche en matière de
lutte contre la thésaurisation des terres. L’électeur s’y retrouve
comment?
C’est notre rôle dans les exécutifs. On cherche à résoudre des
problèmes réels, une recherche de consensus. Dans ma réflexion je
tiens naturellement compte de l’avis de mon parti mais au final je
défends la décision prise au sein du collège de l’Exécutif cantonal.
Les candidats people au sein des partis politiques. A votre
avis est-ce une valeur ajoutée à l’image d’un parti?
Je ne suis pas favorable aux candidatures purement people. C’est
notre société très médiatisée et à la recherche du sensationnel qui
contribue à cela. Mais certaines expériences ont démontré que les
candidats se lassent vite et cela crée aussi des conflits avec des
personnes plus discrètes mais très utiles au sein de leur parti.
C’est différent si une personne est très médiatisée par sa
personnalité et ses compétences au sein du parti comme Christoph
Blocher par exemple.
Vous vous lancez dans la course aux Conseil des Etats. Une
envie de passer à autre chose à Berne ?
Je pense apporter une grande connaissance du canton de Vaud avec
14 ans au sein de l’Exécutif. J’ai l’expérience du terrain dans
l’application d’un projet ou la réalisation d’une idée. Il me semble
qu’il manque parfois au Conseil des Etats cette vision pratique des
dossiers et leur mise en application.
Dany Schaer |
|

 |

Jean-Claude Mermoud |

Pierre-Alain Rumley |
 |
|