Zoo de Servion
Le Chômage à 60 ans peut être un nouveau départ

Bernard Bourqui chez les cerfs
Encore faut-il être ouvert au changement, prêt à
apprendre un nouveau métier, faire confiance en ses capacités et
rencontrer les bonnes personnes. Bernard Bourqui, graphiste
indépendant, doit fermer boutique faute de commande. Passionné
et membre d’un club d’échecs il s’accroche, en parle à un ami du
club, Roland Bulliard, directeur du zoo de Servion.
Nous avons retrouvé Bernard Bourqui 8 ans plus tard, heureux
comme un pinson, entre sceau, pelle et balai dans le parc aux
loups. L’horloge a tourné et les mauvais jours ne sont plus que
souvenirs lointains. Alors que le candidat à l’embauche n’était
pas un fervent adepte des animaux en captivité il découvre le
zoo de Servion en compagnie de Roland Bulliard en 2007. «
J’étais ébloui par ce lieu où les animaux coulent des jours
heureux et ravi que l’on me donne une chance. J’avais tout à
apprendre. Engagé pour l’entretien du parc animalier je me suis
mis aux travaux de menuiserie, maçonnerie, nettoyage puis petit
à petit j’ai appris les tâches de remplaçant gardien d’animaux.
Je dis toujours ici c’est le Club Med pour nos amies les bêtes.
Avec ce nouvel emploi j’ai retrouvé une santé notamment une
excellente condition physique. Parfois j’en oublie même mon âge
et je ne pense pas à présenter ma carte AVS lorsque je me rends
à un spectacle», ajoute-t-il en riant.
Après plus de 35 ans à la tête de son entreprise de graphisme
puis deux ans dans un bureau de géomètre avant d’atteindre l’âge
fatidique des 60 ans, Bernard partageait ses loisirs entre son
club d’échecs et les balades avec ses chiens. Sa venue au zoo
lui a permis de découvrir combien le contact avec les animaux
lui est venu naturellement. Nous nous rappelons la petite fugue
de l’ours Martin. Lorsque Bernard l’appelle le plantigrade vient
tout de suite vers lui et avec la douceur d’une équipe réintègre
son parc sans problème. Cléa, la lionne, qui perd en été 2014
son compagnon Léo, bénéficie de sa visite régulière de l’autre
côté du grillage. Des moments de complicité bienvenus dans sa
nouvelle solitude. Lorsque le tigre Oural subit son opération
dentaire, la main rassurante de Bernard contre la vitre, juste
avant l’anesthésie, rassure l’animal qui vient y frotter sa
tête. Des gestes qui ne trompent pas. L’homme a trouvé un job
qui est bien plus que combler un vide professionnel jusqu’à
l’âge de la retraite.
« Mon regard sur les zoos a totalement changé. Lorsque je
regarde des émissions télévisées sur la vie sauvage et que je
vois le braconnage d’animaux, l’extermination de certaines
espèces je mesure combien le rôle des parcs animaliers est
important. En participant à des programmes internationaux ils
permettent de sauvegarder des espèces en voie d’extinction et
chaque zoo tient à offrir aux animaux un cadre de vie agréable
et approprié ».
Et que pense Roland Bulliard, directeur du zoo de Servion ? «
C’était un nouveau challenge et j’avoue avoir beaucoup de chance
d’avoir Bernard Bourqui au sein de l’équipe. Il a très vite
trouvé sa juste place et a développé un excellent contact avec
les animaux. Leur pouls lui importe plus que son horaire de
travail et son attitude les rassure. Si on a besoin de lui il
répond toujours présent et le contact avec le public lui plait
beaucoup. Lorsque l’on parvient à remettre sur les rails une
personne au chômage c’est aussi respecter la dignité de l’homme
et les valeurs essentielles de notre société ». Comme quoi une
partie d’échecs ne se termine pas toujours par échec et mat.
Dany Schaer

Bernard Bourqui chez les loups
Paru en janvier 2015
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